L'autobiogrphie comme genre littéraire se définit, selon Lejeune, comme "le récit rétrospectif en prose qu'une personne réelle fait de sa propre existence, lorsqu'elle met l'accent sur sa vie individuelle, en particulier sur l'histoire de sa personnalité." D'où plusieurs conditions qui la séparent des genres voisins tels que la biographie, les mémoires..., et surtout le roman autobiographique. La plus importante en est celle de l'identité d'un côté du narrateur et du personnage, et de l'autre côté du narrateur et de l'auteur, une condition qui renvoie à la narration autodiégé tique du récit et au pacte des noms propres. Pourtant l'analyse pratique montre, comme on le voit dans la problématique de l'autobiographie à la troisième personne et aussi dans le jeu d'ambiguïté de Yautofiction, que la définition textuelle de l'autobiographie n'est pas sans limites. Ce qui nous amène à dire que le pacte référentiel de l'autobiographie ne consiste pas à vérifier le raconté du texte, mais se contente de sa vérifiabilité même.
En fait, des souvenirs qu'on croit garder de l'enfance sont rarement fidèles à la réalité du passé. C'est qu'ils n'ont pas émergé du passé, mais ils se produisent dans le contexte du présent. Ainsi, entre la réalité exacte et la vérité du moi, se trouve-t-il un espace de fiction comme transformation ou déformation. Nous pouvons lire donc, par les souvenirs du passé ou par l'évocation des souvenirs, le fantasme de celui qui écrit : la valeur des souvenirs évoqués dans le texte n'est autre que celle de l'utilité interprétative. Le projet de l'écriture autobiographique moderne s'explique enfin par le soupçon lancé sur les limites de la mémoire, le sujet cohérent, et l'écriture autobiographique même, un soupçon qui, aux yeux des lecteurs, garantit paradoxalement l'authenticité de l'auteur. Qn peut se demander alors ce qui pousse à la recherche de l'identité par l'écriture. Il faut dire qu'à l'origine du désir de dire dans l'autobiographie, il y a la culpabilité de l'homme ou l'angoisse ontologique de l'être : on essaie de se justifier aux yeux des autres, pour se reconnaître soi-même. Si on écrit sous sa propre signature, il ne s'agit pas de tout dire, mais d'un acte de dire.