Si la critique littéraire vise à comprendre la genèse des oeuvres d'art, la critique thématique proposée par Jean-Paul Weber s'attache notamment à l'enfance de l'auteur. Selon lui, « l'oeuvre totale d'un écrivain [...] exprime [...] une hantise ou un thème unique, ce thème lui-même se racinant dans quelque événement en général oublié de l'enfance de l'écrivain. »
L’enfance de Stendhal se caractérise surtout par la mort de sa mère et une expérience particulière. Stendhal perdit sa mère à sept ans. Avant cet 'évènement', Stendhal disait qu'il était amoureux de sa mère, qu'il voulait couvrir sa mère de baisers et qu'il n'y eût pas de vêtements. Le mythe d'OEdipe renaît et s'intensifie chez Stendhal lorsqu'il évoque une scène de la chambre de sa mère morte : « Un soir, comme par quelque hasard on m'avait mis coucher dans sa chambre par terre, sur un matelas, cette femme vive et légère comme une biche sauta par-dessus mon matelas pour atteindre plus vite à son lit. »
Nulle autre oeuvre littéraire ne fournirait à la psychanalyse un plus bel exemple du 'complexe d'OEdipe' que les premières pages de la Vie de Henry Brulard. D'après la théorie de la psychanalyse, le souvenir de la scène traumatique persiste pendant un certain temps. Dans le domaine de la création littéraire, « on ne saurait donc attribuer la hantise d'une fantaisie à quelque événement mineur et tardif, où le moi ne s'est certainement pas senti en péril de destruction psychique. » Selon Roland Barthes, « l'écrivain est quelqu'un qui joue avec le corps de sa mère ».
Après avoir connu une expérience spéciale, il ne s'agira désormais que du « bon usage du traumatisme originaire » qui deviendra une « scène originaire de l'esthétique ». Dans le système de la représentation inconsciente de Stendhal, si l'on considère la manière d'écrire le moment du bonheur, le mouvement intérieur de l'âme et la scène érotique, on constate constamment l'ellipse. Dans la Vie de Henry Brulard ainsi que dans Le Rouge et le Noir et La Chartreuse de Parme, après de longs déroulements du récit avec la déscription détaillée, on se rend compte que le rytheme de la narration s'accélère pour remplacer la description et l’analyse de la scène érotique. L'élision des temps forts est un des traits marquants du récit stendhalien. On se demande si cette rétention vient de l'expérience originelle de l'auteur de la Vie de Henry Brulard. Dans le processus inconscient qui sous-tend toute l'écriture stendhalienne, l'ellipse pouurait être considérée comme l'émergence de l'inconscient de Stendhal. Après la mort de sa mère, le bonheur, pour lui, ne saurait se décrire. Le bonheur est un vide, une ligne de points. Selon lui, « on gâte des sentiments si tendres à les raconter en détail. »