Camus ne laisse jamais planer aucune ambiguite´ sur sa pre´fe´rence de l`Helle´nisme sur le Christianisme. En se conside´rant comme fils de la Gre｀ce, il consigne dans ses carnets que le monde, ou｀ il est le plus a｀ l`aise, est celui du mythe grec. L`admiration camusienne de l`Helle´nisme n`est pourtant pas base´e sur une connaissance profonde, mais elle est d`abord instinctive et puis apprise de Nietzsche. Comme ce philosophe allemand, Camus s`est approche´ de l`Helle´nisme avec ses propres pre´juge´s et ses propres anticipations. Pour cette raison, bien que, de son e´tude universitaire de 1936 sur l`Helle´nisme et le Christianisme a´ L`Homme Re´volte´ de 1951, sa compre´hension de l`Helle´nisme se soit approfondie, Camus a toujours eu tendance a｀ ge´ne´raliser et a｀ simplifier la culture grecque et a｀ confondre l`ide´al des Grecs antiques avec son propre ide´al. Comme plusieurs critiques l`ont de´ja｀ remarque´, les oeuvres camusiennes sont impregne´es du de´sir de retourner a｀ la nature. Chez Camus, la nature incarne l`espace originel et le temps sacre´ ou｀ l`homme est ne´ et ou｀ il aspire a｀ retourner. Ce culte de la nature ame｀ne Camus a｀ refuser le Christianisme et a｀ ide´aliser l`Helle´nisme. Car Camus conside｀re comme un truisme historique le fait que les Grecs n`aient pas eu de sens de l`histoire. Nous pouvons lire dans ses carnets date´s de De´cembre 1937; "Les Grecs, peuple heureux, n`ont pas d`histoire." (Carnets Ⅰ, 100) Camus voit dans l`Helle´nisme l`union et l`harmonie de l`homme avec la nature. Par contre, Camus reproche au Christianisme d`avoir se´pare´ l`homme de la nature au profit de l`histoire. Il remarque par la｀ ce qui se´pare fondamentalement le Christianisme de l`Helle´nisme et la complicite´ du Christianisme et du Marxisme: tous deux e´loignent l`homme de la nature et le font entrer dans l`histoire. L`attitude camusienne qui est de conside´rer l`Helle´nisme et le Christianisme en termes d`antithe｀ses, vient de Nietzsche. L`attaque se´ve｀re de Nietzsche contre deux mille ans d`anti-nature a joue´ le ro＾le principal sur le point de vue particulier de Camus a｀ l`e´gard de l`Helle´nisme et du Christianisme. Chaque fois que Camus critique le Christianisme, il pose l`Helle´nisme comme son contrepoint. En fait, Camus, comme Nietzsche, ide´alise l`Helle´nisme pour s`armer mieux contre le Christianisme. Camus de´finit le Christianisme comme une doctrine de l`injustice. Car, selon lui, le Christianisme est fonde´ sur le sacrifice de l`innocent et l`acceptation de ce sacrifice. (Actuelles Ⅰ, 271) Camus le conc¿oit comme une religion totalitaire, monologue´e et dicte´e du haut d`une montagne solitaire, si bien qu`a｀ ses yeux, le Christianisme a ine´vitablement engendre´ des totalitarismes modernes et qu`il est donc responsable des maux du temps moderne. Camus propose l`Helle´nisme comme la pense´e de la mesure qui peut sauver l`Occident. C`est dans l`Helle´nisme qu`il trouve l`esprit et la force pour pre´parer la renaissance de l`Europe prive´e de la mediation et exile´e de la beaute´ d`He´le｀ne.